Vaud: Polémique sur les assermentations à l'église
50 communes du canton de Vaud célèbrent encore les assermentations des nouvelles autorités politiques dans leurs églises et temples. Cette pratique n’est pas du goût de certains élus qui y voient une atteinte au principe de laïcité de l’Etat.
Quatre nouveaux conseillers communaux de Cossonay, près de Morges, ont refusé, en mai dernier, de prêter serment dans le temple local, rapporte le 2 juin 2016 le quotidien romand 24 Heures.
Qu’ils soient pour, contre ou qu’ils la tolèrent, l’assermentation à l’église fait réagir certains élus. A Saint-Prex, près de Lausanne, une interpellation a été déposée par Fabrice Dessaux afin de déplacer l’événement dans un lieu laïc. «Pour moi, c’est une tradition qui n’a plus de sens. Il faut la changer, estime le conseiller communal. C’est le dernier reste d’une tradition qui mêle politique et Eglises et les choses devraient être séparées».
Comme Noël
Ce sont souvent les mêmes raisons qu’invoquent ceux qui plébiscitent l’inverse, note 24 Heures. «C’est historique, c’est comme à Noël, le pasteur et le curé sont là en tant qu’hôtes. Cela permet de conserver un lien avec nos racines», affirme Serge Reichen, syndic de Paudex, une commune qui pratique encore les assermentations à l’église.
Grégoire Mayor, chargé d’enseignement à l’Institut d’ethnologie de l’Université de Neuchâtel, constate que cette cérémonie solennelle présente une mise en scène symbolique du pouvoir. «Si les participants en plaisantent parfois, la supprimer poserait certainement un problème», note-t-il.
Opposition gauche-droite
En terre vaudoise, cette tradition remonte à l’époque de l’administration bernoise. Sous le régime bernois, les militaires et les fonctionnaires devaient prêter serment. En 1798, sous l’influence de la Révolution française, tous les citoyens y sont astreints. Puis cela est à nouveau réservé aux autorités, explique Grégoire Mayor. Avec les libres-penseurs, les premières contestations ne tardent pas à arriver. En 1871, le texte du serment est amputé de la formule «Je le jure» au profit d’une promesse solennelle. En 1921, les socialistes lancent un débat visant à laïciser les assermentations. Comme c’est toujours le cas de nos jours, leur vision de la symbolique de ce rituel les oppose aux partis bourgeois.
Pour comprendre cette relation particulière Etat-Eglises propre au canton de Vaud, il faut sortir de la perspective française de la laïcité, explique le théologien de l’Université de Lausanne, Bernard Reymond. «Notre conception de cette notion se rapprocherait plus de celle des Etats-Unis, où le gouvernement n’appartient à aucune Eglise mais où le président est assermenté devant Dieu», remarque-t-il. (cath.ch-apic/24h/rz)