Le Kosovo laïc devient un véritable vivier pour djihadistes
Les musulmans du Kosovo, une région balkanique qui fit partie de l’Empire ottoman durant près de cinq siècles, appartiennent au hanafisme, la plus libérale des quatre écoles sunnites. Mais le radicalisme wahhabite importé d’Arabie Saoudite a transformé le pays – qui dispose pourtant d’une Constitution reposant sur le principe de la laïcité – en véritable vivier pour djihadistes.
D’après un reportage réalisé au Kosovo par le New York Times, les flux financiers venant de l’Arabie saoudite ont permis la pénétration d’un islam wahhabite intolérant. Ces fonds ont contribué à changer le visage de cette société musulmane autrefois connue pour sa tolérance religieuse et ont favorisé l’envoi de combattants djihadistes au Moyen-Orient.
L’Arabie saoudite finance l’extrémisme
Selon le journal américain, quelque 200 Kosovars ont reçu des bourses après la guerre contre la Serbie pour aller étudier l’islam en Arabie saoudite. Nombre d’entre eux sont revenus au pays avec un fort zèle missionnaire, permettant d’implanter le wahhabisme dans le pays.
Des centaines de mosquée ont été construites au Kosovo avec de l’argent venant de Ryad, fourni tant par des organisations caritatives musulmanes, que des ministères et des personnes privées. Ces fonds ont financé la promotion du wahhabisme, l’idéologie conservatrice dominante en Arabie Saoudite, depuis les 17 ans que le Kosovo n’est plus sous domination serbe.
Un véritable «pipeline pour les djihadistes»
Dans ces nouvelles mosquées, les imams formés en Arabie Saoudite propagent une vision très rigoriste de l’islam et développent un discours radical en faveur du djihad. Des imams critiquant les islamistes radicaux ont été agressés et menacés de mort.
Dans certains cas, des mosquées pluri centenaires ainsi qu’une librairie historique à Gjakovë (Djakovica) ont été rasées au bulldozer, ainsi que des sanctuaires, des tombes et des monastères de derviches, écrit le journal. Ils étaient considérés comme de l’idolâtrie par l’idéologie wahhabite. Quatorze imams ont été arrêtés et dix-neuf associations musulmanes fermées ces deux dernières années pour activités contraires à la Constitution, incitation à la haine et recrutement de terroristes, relève le journal américain.
Une société musulmane autrefois tolérante
Alors que le pays était en grande partie sous la surveillance de fonctionnaires américains, l’argent saoudien et l’influence des monarchies du Golfe ont transformé cette société musulmane autrefois tolérante en un vivier de l’extrémisme islamique et un «pipeline pour les djihadistes», écrit le New York Times. Ces deux dernières années, 314 Kosovars sont partis rejoindre le soi-disant «Etat islamique», dont deux kamikazes, 44 femmes et 28 enfants. Cela fait du Kosovo le pays européen qui compte le plus grand nombre de recrues de Daech par tête d’habitants.
Ces recrues ont été radicalisées et recrutées, selon les enquêteurs, par un groupe de religieux extrémistes et des associations secrètes financées par l’Arabie Saoudite et d’autres Etats conservateurs du Golfe, se servant d’un réseau secret pour convoyer des dons d’organisations caritatives, de particuliers et de ministères.
L’illusion de créer une nouvelle démocratie
«Il s’agit d’un tournant étourdissant pour un territoire comptant 1,8 million d’habitants et qui figurait il y a pas longtemps encore parmi les sociétés musulmanes les plus pro-américaines du monde (…). Là où les Américains voyaient la possibilité de créer une nouvelle démocratie, les Saoudiens ont vu un terrain pour propager le wahhabisme», écrit le New York Times. (cath.ch-apic/nyt/be)