Brésil: Explosion du nombre d’homicides liés à la terre
En 2015, le nombre d’assassinats lié aux conflits de la terre a explosé. C’est ce que révèle la 31ème édition du rapport annuel de la Commission pastorale de la terre (CPT) «Conflits pour la Terre 2015», rendu public le 15 avril 2016, dans le cadre de la Conférence Internationale pour la réforme Agraire, à Marabá, dans l’Etat amazonien du Pará.
Présenté par le Président de la CPT, Mgr Enemésio Lazzaris, le rapport révèle que 50 assassinats ont été commis l’an dernier. «Il s’agit du nombre le plus élevé depuis 2004, a indiqué le prélat. Il est de 39% supérieur à celui de 2014, qui avait enregistré 36 victimes d’homicides. 47 de ces assassinats ont eu lieu dans le cadre de conflits pour la terre, un à cause d’un conflit lié au travail et deux sont liés à des conflits liés à l’eau».
80% des victimes en Amazonie
Lors de la présentation du rapport, Mgr Enemésio Lazzaris a rappelé que 40 et 50 assassinats avaient été perpétrés dans la région amazonienne, au nord du Brésil. «19 l’ont été dans l’Etat du Pará, 20 dans l’Etat du Rondônia et un dans l’Etat d’ Amazonas. Pire, si l’on inclut les Etats limitrophes du Maranhão et du Mato Grosso du Sud, Le chiffre grimpe à 47 homicides.
Pour les responsables de la CPT, ces chiffres confirment que l’Amazonie continue d’être une des nouvelles frontières pour le capital. L’agrobusiness, avec en particulier l’expansion du soja et de l’élevage dans la région, ainsi que l’industrie minière et l’extraction de bois, oblige les pouvoirs publics à créer des infrastructures nécessaires pour garantir des bénéfices conséquents. D’où la construction de complexes hydroélectriques, de ports et d’aéroports, et l’aménagement de voies fluviales et de routes. «Tout cela valorise les terres». Un terreau idéal, selon la CPT, pour favoriser la concentration des terres et provoquer ainsi l’augmentation des conflits.
Pas de réforme agraire efficace
L’autre facteur permettant d’expliquer la violence liée à la terre, en particulier en Amazonie, est l’absence de régularisation foncière. «La grande partie des conflits en 2015, tant dans l’Etat du Pará que dans celui du Rondônia, ont eu lieu sur des terres où les contrats d’aliénation des terres publiques (CATPs), ont été annulés ou non appliqués».
Ces contrats permettent en effet à l’Etat, au nom de la réforme agraire, de récupérer des terres publiques occupées illégalement par des grands propriétaires terriens pour les redistribuer à des petits paysans en quête de terre. «Sauf que dans la réalité, les petits paysans, s’ils parviennent à obtenir un lopin de terre, sont le plus souvent harcelés, menacés de mort, voire même assassinés par les anciens occupants. Le tout dans un climat d’impunité totale», a souligné le prélat.
Plus de 800’000 personnes touchées
Finalement, la seule bonne nouvelle du rapport de la CPT concerne le nombre total de conflits liés à la terre. «Il a baissé en 2015 par rapport à l’année précédente, a indiqué Mgr Enemésio Lazzaris, passant de 1’286 à 1’217 cas enregistrés». En revanche, le nombre de personnes touchées par les conflits, lui, n’a que très peu baissé, passant de 817’102 personnes en 2014 à 816’837, en 2015. (cath.ch-apic/jcg/rz)