Le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, reçu par le pape avec les prêtres lyonnais (Photo: Maurice Page)
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Les évêques français veulent faire la vérité pour les victimes d'abus sexuels

Faire la vérité pour les victimes d’abus sexuels, telle est la volonté de tous les évêques de France, a déclaré le 15 mars 2016, Mgr Georges Pontier, archevêque de Marseille. Le président de la Conférence épiscopale (CEF) s’exprimait en ouverture de l’assemblée plénière des évêques réunis à Lourdes.

«Je tiens à redire ici, en notre nom à tous, que les évêques de France ont une volonté: faire la vérité pour les victimes. C’est cette priorité qui doit guider toutes nos actions dans ces affaires si douloureuses», a souligné Mgr Pontier dans son discours inaugural, alors que la polémique enfle autour de Mgr Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, accusé d’avoir maintenu en place des prêtres dont il connaissait le passé pédophile.

«La pédophilie est ces jours-ci remise au cœur de l’actualité médiatique à-travers une histoire ancienne dont les douleurs des victimes que je salue en votre nom restent vives. Une enquête est ouverte à Lyon au sujet des comportements d’un prêtre voici plus de vingt ans et sur les éventuelles responsabilités des autorités ecclésiastiques«, a déclaré Mgr Pontier.

Le président de la CEF a réaffirmé son soutien à son confrère qui «a dit clairement son engagement et celui du diocèse à travailler loyalement avec la justice. Je tiens à l’assurer de notre prière et de notre amitié.»

Accueillir les victimes

Mgr Pontier a rappelé en outre que la question douloureuse de l’attitude de l’Église face à la pédophilie a occupé une partie importante des deux dernières assemblées de l’épiscopat à Lourdes. «Des cas épars, récents ou plus anciens, apparaissent encore chaque année dans nos diocèses. Notre engagement est clair et partagé par nous tous: privilégier l’accueil des victimes et de leurs familles, les inciter à porter plainte, engager les procédures canoniques contre les auteurs de ces actes et travailler en toute loyauté avec la justice de notre pays. Les règles, les bonnes pratiques et les mesures de prévention et d’éducation que nous avons mises en place sont sans équivoque. La cellule de veille sur la pédophilie continue son travail pour répondre aux éventuelles questions nouvelles qui pourraient se poser et pour apporter une aide aux évêques qui le souhaiteraient, notamment pour l’accueil et l’écoute des victimes.»

«Jamais je n’ai couvert le moindre acte de pédophilie»

«Je veux dire avec la plus grande force que jamais, jamais, jamais je n’ai couvert le moindre acte de pédophilie», a déclaré en conférence de presse à Lourdes le cardinal Barbarin. «Quand c’est fait par un prêtre, c’est encore plus horrible, car les parents ont mis leur confiance dans ce prêtre… on comprend leur colère, leur désarroi, leur souffrance.» Le prélat a rappelé qu’en 2006 et 2014 il a écarté de leur ministère deux prêtres pour des raisons de pédophilie. «Mais que faire pour des faits anciens ?», s’est-il demandé. Des faits «épouvantables», mais prescrits par la loi. Il s’est interrogé de la possibilité d’étendre la prescription canonique.

S’exprimant également sur la plainte déposée par un certain Pierre contre le Père Jérôme Billioud, qui l’aurait attouché lorsqu’il avait 16 ans, Mgr Barbarin a expliqué que ce cas «n’a rien à voir avec la pédophilie». Les faits concernaient un jeune homme âgé de 17 ans en 1990, puis 20 ans et la plainte, déposée en 2009, 19 ans après les faits, avait été classée sans suite, pour cause de prescription.

L’évêque de Pontoise, Mgr Stanislas Lalanne, a indiqué de son côté que «sur les faits récents, nous sommes clairs et déterminés, on pousse les victimes à porter plainte. Là où c’est plus difficile, c’est lorsque les faits sont anciens ou très anciens. Certaines victimes devenues des adultes ne souhaitent pas porter plainte, mais souhaitent une reconnaissance de l’Eglise. Il y a une prescription juridique, mais il n’y a pas de prescription pastorale ou morale», a conclu le prélat.

Réponse du Père Lombardi à l’association «La parole libérée»

A Rome, le Père Federico Lombardi, directeur de la Salle de presse du Saint-Siège, a réagi, le 15 mars, à la lettre publiée par l’association «La parole libérée», qui accuse les responsables du diocèse de Lyon, parmi lesquels le cardinal Philippe Barbarin en personne, d’avoir couvert les agissements d’un prêtre pédophile.

Aux auteurs de la lettre qui demandent à être reçus par le pape, le Père Lombardi répond «qu’en principe, la requête d’une audience papale privée ne passe pas par la presse. Sa publication tend évidemment à exercer une forte pression médiatique. Jusqu’ici, les rencontres de victimes d’abus sexuels par les papes se sont déroulées après qu’on se soit assuré du climat d’écoute et de dialogue nécessaire pour porter des fruits spirituels».

Pour le cas évoqué, le Père Lombardi relève qu’il est opportun d’attendre le résultat de l’enquête de la justice française. «Quel qu’il puisse être, eu égard à son sens de la responsabilité, on doit manifester estime et respect envers le cardinal Barbarin. Cela ne saurait être considéré comme une offense à l’endroit de qui que ce soit». (cath.ch-apic/com/rv/mp)

Le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, reçu par le pape avec les prêtres lyonnais
15 mars 2016 | 16:02
par Maurice Page
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