La Chine entre-t-elle dans une nouvelle phase de relations avec le Vatican? (Photo: radiowood/Flickr/CC BY-NC 2.0)
Vatican

L’interview du pape François sur la Chine suscite le scepticisme

Au lendemain de la publication de l’entretien inédit du pape François sur la Chine au journal en ligne Asia Times, le 3 février 2016, les commentaires des vaticanistes sont mitigés, et la plupart sceptiques. Pour le vaticaniste italien Sandro Magister, cette interview est un «superbe exemple de Realpolitik poussée à l’extrême». «Il l’est par son silence total – conclu avec l’intervieweur – sur les questions religieuses et de liberté», écrit-il sur son blog Settimo Cielo.

Le journaliste d’Asia Times Francesco Sisci a en effet assuré qu’il avait «intentionnellement» refusé de poser des questions au pape sur les persécutions religieuses exercées par le gouvernement chinois. Sandro Magister reproche en outre des paroles du pape absolues et sans retenue sur la Chine, exhortée à se faire ›miséricorde envers elle-même» par rapport à son passé, tandis qu’il ne mentionne jamais les millions de victimes du communisme.

Le vaticaniste américain John Allen, pour sa part, regrette que «l’ouverture du pape à la Chine passe sous silence la liberté religieuse». Il note cependant que cette ligne dans la diplomatie vaticane vis-à-vis de l’Empire du Milieu n’est pas nouvelle : «cela remonte au moins à 1966, lorsque Paul VI envoya des vœux de nouvel an au président Mao sans mentionner les cruautés de la Révolution culturelle». Pour Rome, explique le vaticaniste, mentionner les persécutions des minorités religieuses ne ferait qu’empirer les choses et seul le respect affiché garantirait des améliorations à long terme.

Il rappelle cependant que deux évêques catholiques sont actuellement en prison dans le pays, et d’autres constamment surveillés par des agents de sécurité du gouvernement. «Ceux qui paient le prix pour leur foi en Chine aujourd’hui pourraient être déçus que le pape n’ait pas parlé de leur sort plus directement, estime alors John Allen. Le temps dira si les bonnes grâces qu’un pape achète en faisant l’impasse sur de tels sujets produira des résultats au final.

Géopolitique de la miséricorde

Dans Avvenire, quotidien de l’épiscopat italien, la vaticaniste Stefania Falasca se veut plus optimiste que ses confrères. Cette proche du pontife évoque un important message du pape François et une géopolitique de la miséricorde. Pour elle, «le pape affronte de manière inédite la question des peurs provoquées par l’ascension économico-géopolitique de la Chine populaire», et «exorcise les présages dévastateurs de futurs conflits entre la Chine et d’autres superpuissances mondiales». Dans cet entretien, le pape affirme en effet que la peur n’est jamais bonne conseillère et que la Chine a la même capacité que le monde occidental et le monde oriental à maintenir l’équilibre de la paix.

Il ne s’agit plus de «trouver un équilibre sur la base de l’opposition mais d’imaginer une vision multipolaire du monde où il serait possible de collaborer pour une croissance et une gestion de la maison commune», conclut la journaliste italienne. (cath.ch-apic/imedia/bl/mp)

La Chine entre-t-elle dans une nouvelle phase de relations avec le Vatican?
3 février 2016 | 13:34
par Maurice Page
Temps de lecture : env. 2  min.
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