Daech utilise des enfants comme bombes humaines
Les djihadistes de Daech, en Syrie et en Irak, envoient au front des enfants bardés d’explosifs, assure un chef kurde interrogé mi-janvier 2016 par le média américain CNN. Des enfants ayant réussi à s’enfuir de l’enfer des camps d’entraînement témoignent du lavage de cerveau qu’il subissent.
Aziz Abdullah Hadur, un commandant peshmerga kurde du nord de l’Irak, affirme que ses soldats doivent parfois abattre les enfants envoyés par l’Etat islamique (EI) pour attaquer la ligne de front. Les combattants kurdes ont peu de temps pour prendre une décision. «Nous ne savons pas, lorsqu’ils approchent de nos positions, s’ils se sont échappés ou s’ils ont été envoyés pour nous tuer», explique l’officier. Il souligne que c’est une décision incroyablement difficile à prendre. «Souvent, si on ne les tue pas, ce sont eux qui nous tuent».
Daech est sous pression militaire
Le djihadistes ne sont qu’à quelques dizaines de mètres des positions kurdes, de l’autre côté d’un pont détruit. Lorsque les Kurdes observe les lignes adverses, ils voient des enfants portant des vestes explosives. «Ils ont subi un lavage de cerveau», assure Aziz Abdullah Hadur.
Ils nous disent qu’ils vivaient en enfer
Le dilemme des combattants kurdes devient de plus en plus aigu, à mesure que Daech envoie plus d’enfants dans la bataille, affirme CNN. D’après des sources militaires américaines, ce phénomène est en partie dû à la pression militaire croissante que subissent les islamistes. Le fait de présenter au monde extérieur la brutalité de ses tactiques fait également partie de la stratégie de propagande de l’EI. Ils sont conscients de la révulsion que beaucoup peuvent ressentir concernant l’utilisation d’enfants dans des buts guerriers.
Incités à tuer leurs parents
Certains enfants ont pourtant réussi à s’échapper de l’emprise des djihadistes. Aziz Abdullah Hadur assure que ceux qui parviennent à traverser la ligne de front sont dans un état désespéré. «Lorsqu’ils arrivent, ils sont si maigres qu’ils paraissent à peine humains, affirme-t-il. Ils nous disent qu’ils vivaient en enfer».
CNN raconte l’histoire de Nasir, l’un de ces miraculés, âgé de 12 ans. L’EI l’entraînait à devenir un kamikaze. Le garçon a maintenant retrouvé sa mère, dans le camp de réfugiés d’Esyan, au Kurdistan, qui abrite 15’000 représentants de la minorité religieuses yézidie qui ont fui Daech.
Il explique que le camp d’entraînement hébergeait 60 autres jeunes garçons. «Le moment le plus effrayant pour nous a été le début des bombardements, raconte-t-il. Ils nous ont emmenés sous terre, dans des tunnels, pour nous cacher. Ils nous ont dit que les mécréants, les Américains, voulaient nous tuer, mais qu’eux, les combattants, nous aimaient. Ils nous ont assuré qu’ils veilleraient sur nous mieux que nos parents». Au cours de leur entraînement, les djihadistes leur ont dit que leurs parents étaient des mécréants et que leur premier travail serait de rentrer pour les tuer.
Interdit de pleurer
L’utilisation par Daech d’enfants soldat est un fait avéré, relève CNN. Des vidéos diffusées par les djihadistes eux-mêmes vantent ces pratiques.
L’endoctrinement subi par Nasir est similaire à celui de tous les autres enfants captifs des islamistes. Leurs geôliers leur font notamment croire à chaque fois qu’ils sont à présent leur seule famille.
Qu’est-ce que cela peut faire à un enfant?
D’après Nasir, le plus jeune garçon du camp n’était âgé que de 5 ans, mais aucun n’était exempté de l’entraînement éreintant imposé. «Il nous était interdit de pleurer. Mais je pensais à ma mère, je pensais qu’elle se faisait du souci pour moi, mais je pleurais sans faire de bruit. Lorsque nous nous sommes échappés et que j’ai revu ma mère, c’était comme si je revenais à la vie», raconte le jeune garçon.
Des enfants traumatisés
Nouri, une autre jeune recrue de l’EI âgée de 11 ans, raconte son calvaire. Il a été enlevé avec sa famille et placé dans un camp de Daech à Tel Afar, au nord de l’Irak. Lorsqu’il a refusé de rejoindre les autres garçons pour l’entraînement, les djihadistes lui ont brisé une jambe à trois endroits. Suite à cela, Nouri ne pouvait plus marcher normalement et a été déclaré «inutile» par les combattants. Renonçant à l’abattre, ils l’ont autorisé à rentrer chez lui avec sa grand-mère. Son frère de 5 ans, Saman, a également été libéré. Mais, après avoir été battu régulièrement par les djihadistes, il est profondément traumatisé. Ses parents et son petit frère, encore un bébé, sont toujours aux mains de l’EI.
Khalid Nermo Zedo, un activiste yézidi qui a aidé à fonder le camp d’Esyan, souligne que ces enfants ont désespérément besoin d’une assistance psychologique. Certains ne peuvent même pas entendre le mot «Daech» sans avoir des crises d’angoisse, explique-t-il. Il n’existe cependant sur place aucune structure capable de se charger de ce soutien psychologique. «Ces enfants ont été séparés de leurs familles, forcés à porter des armes, à tuer des innocents. Qu’est-ce que cela peut faire à un enfant? à une famille? à une communauté?» s’interroge Khalid Nermo Zedo. (cath.ch-apic/cnn/rz)