Le patriarche latin de Jérusalem Fouad Twal (Photo: Medialpj CC BY-SA 3.0)
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A Bethléem, le patriarche Fouad Twal appelle à la solidarité avec les réfugiés

«Il est facile de faire preuve de miséricorde envers ceux qui nous sont proches, par le sang, la religion ou la race. Mais il est difficile de l’étendre aux pauvres, aux marginalisés, aux réfugiés, aux prisonniers et aux victimes de la violence et du terrorisme», a déclaré le patriarche latin de Jérusalem Fouad Twal lors de l’homélie de la messe de la nuit de Noël en l’église Sainte-Catherine de Bethléem.

La ville qui a vu naître Jésus était cette année sous haute tension en raison de la violence quotidienne qui règne à Jérusalem et dans les territoires palestiniens occupés. Selon des sources autorisées à Bethléem, cette année à Noël, la ville accueille beaucoup moins de touristes et de pèlerins que l’année précédente, et le taux d’occupation des hôtels est seulement de 40 à 50%.

En présence du président Mahmoud Abbas

En début de la célébration, en annonçant que la porte de la Basilique de la Nativité est l’une des «portes de la Miséricorde», le patriarche latin a dit espérer que beaucoup de fidèles et de pèlerins y passeront au courant de l’année.

Saluant le président de l’Etat de Palestine Mahmoud Abbas et son Premier ministre Rami al Hamdallah, participant à la cérémonie au premier rang, avec de nombreux diplomates et responsables politiques venus du monde entier, le patriarche latin a relevé les «incidents fort regrettables (qui) ont eu lieu dans le monde entier».

La religion est devenue «un motif pour tuer au nom de Dieu»

«Nous pouvons dire avec tristesse que nous avons perdu notre humanité et nos valeurs spirituelles, la religion devenant un motif pour tuer au nom de Dieu, au lieu d’inviter à la fraternité. Ce dont nous souffrons en ces jours est l’absence de miséricorde – comme si l’avènement du Christ et le message de Noël furent vains», a-t-il déploré.

Citant deux paraboles qui illustrent le lien entre la miséricorde divine et la nôtre, à savoir «L’Enfant Prodigue», dont le père attend avec impatience son retour au foyer paternel (Luc 15 : 11-32), et «Le Bon Samaritain» (Luc 10 25-37), il a souligné que «sans éprouver la miséricorde de Dieu dans notre vie, il serait difficile de faire preuve de miséricorde envers les autres».

«Dans nos prières, nous songeons aux maisons démolies à Jérusalem»

Et le patriarche latin de Jérusalem de rappeler «ces millions de réfugiés éparpillés dans des camps et des baraques, en proie à un froid mordant… Nous songeons à ceux qui fuient les zones de conflit, traversant la mer dans des barques de fortune, faisant se transformer la mer en un gigantesque cimetière».

Mais Fouad Twal n’oublie pas le contexte local et cite la violence de l’occupation israélienne: «Dans nos prières, nous songeons aux maisons démolies à Jérusalem et en Palestine, aux terrains expropriés, et aux hommes touchés par une punition collective. Nous songeons aux victimes du terrorisme, partout, de quelque peuple que ce soit. Ils sont tous nos frères en Humanité. Que leur cri devienne le nôtre; abattons ensemble la barrière de l’indifférence!»

Il salue ensuite les Etats qui ont ouvert leurs portes aux exilés: la Jordanie, le Liban, la Turquie, et de nombreux pays européens. «Nous incitons les pays hésitants à dépasser leur crainte face aux réfugiés, à les héberger en attendant que la situation s’améliore, et qu’ils puissent rentrer dans leurs foyers. Oui, il existe encore une miséricorde, et aussi une bonté, dans ce monde. Tout n’est pas perdu!»

«La miséricorde est un acte politique par excellence»

Quand la miséricorde devient une composante de l’action publique, elle sera alors capable de transférer le monde de la sphère des intérêts égoïstes à celle des valeurs humaines, a-t-il insisté. «Ceci coopère à la construction d’un monde meilleur. La miséricorde est un acte politique par excellence, à condition de définir la politique dans son sens le plus noble, c’est-à-dire la prise en charge de la famille humaine à partir des valeurs éthiques, dont la miséricorde est une composante principale, qui s’opposent à la violence, l’oppression, l’injustice, l’autoritarisme et l’esprit de domination».

Le patriarche latin de Jérusalem affirme que les semences de la miséricorde sont implantées dans toutes les religions. «Elles nous lient notamment avec le judaïsme et l’islam, lesquels les considèrent comme d’éminentes caractéristiques de Dieu. Avant d’être l’Omnipotent et le Créateur, Dieu est le Miséricordieux. Il nous appartient de faire activer ces semences pour qu’elles poussent dans notre vie privée et publique».

Un appel «aux décisionnaires de la politique de la mort»

«L’appel à la miséricorde, a-t-il lancé avec force, est fait non seulement aux personnes honnêtes, mais aussi aux malfaiteurs pour qu’ils fassent preuve de repentance. C’est un appel à tous ceux qui détiennent le destin des peuples. Un appel aux décisionnaires de la politique de la mort, pour qu’ils reviennent à leur conscience, et fassent prévaloir la dignité de l’homme au lieu de leurs intérêts matériels. C’est un appel aux producteurs, promoteurs et commerçants d’armes meurtrières – à ceux qui se font une fortune au détriment des souffrances des autres; voyez à quel point cette politique aveugle nous conduit».

Fouad Twal a encore dénoncé tous ceux qui sont impliqués dans la corruption: «Ce vice ignoble est un grand péché criant haut jusqu’au Ciel, car il menace les fondements même de la société. Le corrompu, à travers son avidité, opprime les faibles et écrase les plus démunis. Personne ne peut prétendre être immunisé contre cette tentation. Et afin de l’extirper de la vie individuelle et sociale, il faudrait beaucoup de vigilance et le retour à Dieu».

«En cette soirée où nous célébrons la naissance de l’Apôtre de la Paix et de la Miséricorde, a-t-il conclu, nous sommes venus prier pour que le visage de la Terre se transforme, pour que le monde devienne un abri sûr, où règnent la paix au lieu de la rivalité, la miséricorde au lieu de la vengeance et la charité au lieu de la haine». (cath.ch-apic/plj/be)

 

 

 

 

Le patriarche latin de Jérusalem Fouad Twal
25 décembre 2015 | 11:25
par Jacques Berset
Temps de lecture : env. 4  min.
Bethléem (54), Fouad Twal (10), Noël (247), Palestine (138)
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