Lancement au Liban d'une campagne «contre les guerres religieuses»
Beyrouth, 16.10.2015 (cath.ch-apic) Une campagne «contre les guerres religieuses» a été lancée le 16 octobre 2015 depuis Beyrouth à l’initiative de deux professeurs d’Université, l’ancien ministre Tarek Mitri et le chirurgien, philosophe et professeur à l’Université Saint-Joseph de Beyrouth Antoine Courban.
Ils sont rejoints par Michel Hajji Georgiou, journaliste au quotidien libanais francophone «L’Orient-Le Jour».
Les initiateurs de cette campagne sont connus pour leur hostilité au gouvernement de Bachar al-Assad et à l’intervention de la Russie en sa faveur. Ils dénoncent le «despotisme», «l’oppression, la privation des libertés et le terrorisme sous toutes leurs formes». Ils invitent le public à s’associer à cette campagne en visitant la page Facebook de leur action intitulée «Petition Against Religious Wars» et en signant la pétition.
L’argument douteux de la ‘protection des chrétiens’
Les auteurs de cette campagne déclarent leur «refus catégorique de toute instrumentalisation des sentiments religieux au service d’intérêts politiques». De même, ils rejettent que soit attribuée «une quelconque légitimité religieuse aux positions politiques des Etats, aux opérations militaires de leurs troupes, ou encore aux groupes et organisations armées». Ils refusent également que des guerres ou des actions terroristes puissent être justifiées au nom de la religion.
«Nous refusons sans équivoque que l’argument de la ‘protection des chrétiens’ puisse servir d’alibi au service d’objectifs idéologiques ou politiques, comme certains ont tenté de le faire récemment en appui à l’intervention militaire de la Russie en Syrie», écrivent les initiateurs.
Ne pas bénir les actions armées
Ils estiment que les Eglises chrétiennes ainsi que les institutions religieuses musulmanes «se doivent de prévenir tout dommage pouvant nuire à l’homme, de soulager toute souffrance, de secourir toute victime et de tout mettre en œuvre en vue de la réconciliation. Leur rôle ne saurait être compatible avec le soutien à un conflit armé ou avec sa bénédiction».
Dans ses chroniques pour «L’Orient-Le Jour», par exemple dans «La mort du dieu des armées» ou «Une croisade moscovite à la Daech», Antoine Courban dénonce les prises de position de l’Eglise orthodoxe russe appuyant l’intervention militaire de la Russie en Syrie. Il déplore que Cyrille Ier, patriarche de Moscou, ait déclaré que «l’intervention de la Russie en Syrie est une ‘guerre sainte’». «On croyait révolu le temps des croisades depuis huit siècles. Que n’a-t-on pas écrit et dit à propos du ‘jihad’ comme guerre sainte, et qui serait spécifique à l’islam».
Les Eglises du Levant, «complices d’un tyran» ?
Antoine Courban met également en exergue les récentes déclarations du Père Vsevolod Chaplin, porte-parole officiel du patriarcat de Moscou, «sur la ‘sainteté’ ou la ‘sacralité’ de la campagne militaire de Poutine en faveur du tyran de Syrie, Bachar el-Assad». Il regrette également que «les Eglises du Levant n’ont, hélas, pas suffisamment pris leurs distances à l’égard du pouvoir politique à Damas. Avec la croisade moscovite en faveur de Bachar, elles risquent un terrible jugement de l’histoire qui fait d’elles des complices d’un tyran coupable de crimes contre l’humanité». ORJ/JB
Spécialiste du dialogue interreligieux, Tarek Mitri, chrétien de confession grecque-orthodoxe, a dirigé entre 1991 et 2005 le programme de dialogue interreligieux du Conseil œcuménique des Eglises (COE) à Genève. Il y a piloté plus spécifiquement le dialogue entre chrétiens et musulmans. Professeur d’université, il a été notamment ministre de l’information dans le gouvernement libanais. Il publié plusieurs ouvrages, dont en 2004 «Au nom de la Bible, au nom de l’Amérique», aux éditions Labor et Fides, à Genève. (apic/orj/be)