Tim Guldimann, ancien ambassadeur suisse en Allemagne (Photo:LID/Flickr/CC BY-ND 2.0)
Suisse

Allemagne: Un regard helvétique sur la Réforme

Berlin, 26.07.2015 (cath.ch-apic) L’ancien ambassadeur suisse en Allemagne, Tim Guldimann, a fait partie du comité chargé de préparer le 500e anniversaire de la Réforme protestante qui se déroulera en 2017. Le diplomate a expliqué au service de presse protestant allemand (epd) comment il a apporté un regard helvétique sur la préparation de cet événement au pays de Goethe.

Tim Guldimann, qui a quitté ses fonctions d’ambassadeur suisse en Allemagne fin mai, a été l’un des deux membres étrangers du comité, avec Gottfried Locher, président du Conseil de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS), chargé de préparer le 500e anniversaire de la Réforme protestante, en Allemagne. «Il existe en Suisse un profond intérêt à participer à la préparation des festivités de la Réforme», affirme Tim Guldimann dans une interview relayée le 24 juillet 2015 par l’agence de presse protestante romande Protestinfo. Il indique qu’un projet de participation substantielle de la Suisse dans lequel se serait engagée la Confédération n’a pas fonctionné. «Auprès des autorités fédérales à Berne, on peut constater une certaine retenue face à de tels engagements dans les affaires religieuses», commente le diplomate. Il précise qu’il existe des attitudes bien différentes entre Genève et Zurich.

Approches différentes sur la Réforme

Pour Tim Guldimann, la question se pose de savoir comment va être mise sur pied une participation de la Suisse à «l’Exposition universelle de la Réforme», à Wittemberg, à l’est de l’Allemagne, la ville où le père de la Réforme Martin Luther a vécu et enseigné. Toutes les personnes concernées ont récemment été réunies à Zurich pour voir comment sauver la présence helvétique à cet événement. «Notre approche actuelle démontre aussi les différences entre la Suisse et l’Allemagne par rapport à la Réforme. Nous parlons des réformateurs en Suisse, au pluriel, et non pas seulement de Luther. Pour nous, la Réforme a été l’action de plusieurs personnages importants au 16e siècle», remarque le diplomate suisse. Pour ce dernier, il ne s’agit pas simplement, en Suisse, d’exhiber la Réforme et de la célébrer. «Nous cherchons, davantage, à opposer les deux positions, l’une catholique, l’autre protestante, dans leur compréhension du 16e siècle».

La Réforme, facteur important dans la constitution de la Suisse

Tim Guldimann relève qu’il serait, également important de montrer d’un point de vue purement suisse, combien la Réforme a été importante pour la constitution de l’Etat de la Suisse lui-même, qui a commencé à exister au 16e siècle. «Il y a eu des faits marquants, notamment l’alliance entre la Suisse alémanique et la Suisse francophone. Et sans Calvin et le Calvinisme, Genève ne serait pas aujourd’hui le siège d’importantes institutions internationales comme le siège européen des Nations Unies. Genève doit ce rôle à la sympathie de Woodrow Wilson pour Calvin, qui a proposé cette ville comme siège pour la Société des Nations», note l’ancien ambassadeur.

Sur la question de ce qui est encore spécifiquement suisse dans la Réforme, Tim Guldimann mentionne la Réforme de Zwingli en liaison avec l’Humanisme, avec Erasme, avec Bâle, où la Bible de Luther a été imprimée pour la première fois. «Pour la première fois aussi, on a introduit ici un élément d’émancipation dans la Réforme. Cela a été bien plus fortement exprimé dans la pensée de Zwingli que chez Luther. Car au fond, il ne s’agissait pas seulement d’opposer le pouvoir ecclésiastique au pouvoir étatique, mais aussi les relations entre les croyants et les autorités publiques».  Le diplomate explique que le sens du terme «autorités publiques» diffère entre Zwingli et Luther. Zwingli a défendu ses thèses face aux citoyens réunis qui lui ont dit: «C’est en ordre, tu peux continuer». De son côté, Luther se trouvait à Worms face à l’empereur Charles V, qui proclamait une mise au banc du réformateur.

Zwingli et Calvin, des figures à ne pas oublier

Pour Tim Guldimann, la Suisse a, par rapport à l’Allemagne, une autre culture politique aujourd’hui, qui a été renforcée par la Réforme. «Ainsi, l’entente entre les confessions au 16e siècle a été bien différente en Suisse et en Allemagne, poursuit-il. Concernant la vie en commun entre les catholiques et les protestants, une sorte de tolérance s’est peu à peu installée en Suisse. Tolérance signifiait qu’on pouvait vivre l’un à côté de l’autre sans s’entretuer, ni plus ni moins (…) L’intention suisse a été: ‘Il vaut mieux s’entendre entre nous au lieu d’être entraîné dans les luttes entre les grandes puissances autour de nous’».

Le diplomate suisse estime que pour la bonne compréhension de la Réforme dans le monde, il serait préférable d’opposer quelque chose à l’idée d’un événement uniquement centré autour de Luther. «Sans Zwingli et sans Calvin, la Réforme serait restée probablement une affaire intra-allemande ou de l’Europe septentrionale», lance-t-il.

Tim Guldimann souligne que les bonnes idées existent, mais que le problème actuel est de trouver les personnes nécessaires qui les feront avancer. Pour le diplomate, il est urgent de trouver une «locomotive» qui pourrait entraîner tout le monde. Il précise que «spontanément, les protestants et les catholiques ont mis à disposition des sommes à cinq chiffres pour faire démarrer le tout». (apic/prot/epd/rz)

Tim Guldimann, ancien ambassadeur suisse en Allemagne
26 juillet 2015 | 11:22
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 4  min.
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