Le jésuite espagnol Luis Espinal Camps (1932-1980) sera à l'honneur dans Choisir
Vatican

Le pape François ramène à Rome le ›crucifix communiste’

Rome, 14.07.15 (cath.ch-apic) Dans l’avion qui le ramenait d’Asunción, la capitale du Paraguay, à Rome, le 12 juillet 2015, le pape a confié aux journalistes que le crucifix en forme de faucille et de marteau que lui avait offert le président bolivien n’était «pas une offense». Le pape, qui a reconnu sa surprise lorsqu’il a reçu ce cadeau des mains d’Evo Morales quelques jours plus tôt à La Paz, en Bolivie, a assuré qu’il appartenait à «l’art de la contestation». Il a indiqué avoir ramené avec lui au Vatican cette réplique d’un crucifix imaginé par le Père jésuite Luis Espinal (1932-1980).

Voici la réponse du pape :

«J’étais curieux, je ne connaissais pas cet objet et je ne savais pas non plus que le Père Espinal fût un sculpteur, et aussi un poète. Je l’ai su ces jours-ci. Je l’ai vu et il s’est agi pour moi d’une surprise. Deuxièmement, on peut qualifier cela comme le genre de l’art de la contestation. Par exemple, il y a quelques années, à Buenos Aires, avait eu lieu l’exposition d’un sculpteur (León Ferrari, ndlr), bon, créatif, un Argentin, désormais mort. C’était l’art de la contestation. Je me souviens d’une œuvre: un Christ crucifié sur un bombardier qui piquait vers le sol. C’était une critique du christianisme allié à l’impérialisme qu’est le bombardier.

Premièrement, donc, je ne savais pas. Deuxièmement, je qualifierai cela d’art de la contestation qui, dans certains cas, peut être offensif. Dans certains cas!

Troisièmement, et ça c’est un cas concret: le Père Espinal a été tué en 1980. C’est une époque où la Théologie de la libération avait de nombreuses ramifications et l’une d’entre elles était l’analyse marxiste de la réalité. Le Père Espinal appartenait à cette branche. Ça je le savais parce que j’étais le recteur de la Faculté de théologie et on parlait beaucoup de cela, des diverses ramifications et de ceux qui les représentaient. La même année, le supérieur général de la Compagnie de Jésus, le Père Arrupe, fit une lettre à toute la compagnie sur l’analyse marxiste de la réalité dans la théologie pour arrêter un peu cela… en disant ‘cela ne va pas, ce sont des choses différentes, cela ne va pas, ce n’est pas juste’. Et quatre ans plus tard, en 1984, la Congrégation pour la doctrine de la foi publie un premier petit document, la première déclaration sur la Théologie de la libération, qui la critique. Puis viendra un second document qui ouvre des perspectives plus chrétiennes. Je simplifie un peu.

Faisons l’herméneutique de cette époque: Espinal est un enthousiaste de cette analyse de la réalité marxiste mais aussi de la théologie qui utilise le marxisme. Il a alors créé cette œuvre. Les poésies d’Espinal sont aussi de ce genre de la contestation. Mais, c’était sa vie. C’était sa pensée. C’était un homme particulier avec tant de génialité humaine et qui luttait, lui, en toute bonne foi. En faisant une herméneutique de ce genre, je comprends cette œuvre, et pour moi ce n’est pas une offense. J’ai dû faire cette herméneutique et je vous le dis pour qu’il n’y ait pas d’opinions erronées. Si je l’emmène avec moi? Oui, je l’emmène avec moi». (apic/imedia/rz)

Le jésuite espagnol Luis Espinal Camps (1932-1980) sera à l'honneur dans Choisir
14 juillet 2015 | 07:31
par Raphaël Zbinden
Temps de lecture : env. 2  min.
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