Le père de la Théologie de la libération assure que le «climat» a changé au Vatican
Rome, 12 mai 2015 (Apic) Le dominicain péruvien Gustavo Gutiérrez a assuré le 12 mai 2015 que le «climat» avait changé dans l’Eglise concernant l’option préférentielle pour les pauvres, depuis l’élection du pape François. Le religieux péruvien, considéré comme le «père de la Théologie de la libération», participait à la présentation à la presse au Vatican de la 20e assemblée générale de Caritas Internationalis.
Gustavo Gutiérrez a également soutenu que la Théologie de la libération n’avait pas été condamnée par Rome dans les années 1980, mais avait été au cœur d’un dialogue «critique». «Il n’y a jamais eu de condamnation de la Théologie de la libération, on a dit cela dans les médias, mais ce n’est pas vrai (…), il y a eu un dialogue, critique à certains moments, avec la Congrégation pour la doctrine de la foi». C’est ce qu’a soutenu devant la presse le Père Gustavo Gutiérrez, venu participer à Rome à l’assemblée générale de Caritas Internationalis.
L’option préférentielle pour les pauvres
«Il est vrai qu’en ce moment, le climat sur cette théologie est différent», a en outre reconnu le théologien, interpellé par la presse sur sa présence au Vatican et sa «réhabilitation». Il a toutefois refusé ce dernier terme. «Il n’y a pas eu dés-habilitation», a-t-il répété, ajoutant que la «réhabilitation importante» actuelle devait être celle «des pauvres» et «des périphéries».
Répondant aux questions sur les mises en garde du Vatican, notamment sous le pontificat de Jean Paul II (1978-2005) à la fin des années 1980, contre de possibles dérives marxistes de ce courant de pensée – né au congrès de Medellin en Colombie en 1968 -, le Père Gutiérrez a ainsi rappelé que la notion centrale de la théologie de la libération était «à 90 % l’option préférentielle pour les pauvres». «Désormais, avec le témoignage du pape François, a ajouté le Père Gutiérrez, c’est plus clair».
L’évêque argentin Enrique Angelelli a été assassiné en 1976
Le dominicain a en outre salué l’ouverture récente du procès en béatification de l’évêque argentin Enrique Angelelli (1923-1976), assassiné «comme chrétien (…) pour Dieu, pour l’Eglise et pour le peuple». Il a notamment salué son témoignage en faveur de la justice et de la dignité humaine, jugeant ainsi qu’un «mur est tombé» au Vatican avec, également, la très prochaine béatification de Mgr Oscar Romero, mort martyr «pour l’Eglise et le peuple» et non obligatoirement «tué en haine de la foi».
«Il n’y a pas de charité sans justice», a encore assuré le Père Gutiérrez devant la presse, soulignant que, dans cet esprit, l’Eglise devait «sérieusement prendre en compte les situations inhumaines vécues par tant de personnes dans le monde». «La réflexion théologique doit être entièrement liée à la vie quotidienne des personnes (…) ce n’est pas de la métaphysique, mais une réflexion sur la pratique de la charité», a-t-il encore souligné. «Nous sommes dans la période post-socialiste, post-capitaliste, post-industrielle (…), a encore relevé le Père Gutiérrez, mais nous ne sommes pas dans la période post-pauvreté».
Gustavo Gutiérrez ne renie pas ses convictions profondes
Interrogé sur ce qu’il réécrirait ou changerait s’il avait à le faire, le théologien a affirmé que s’il avait forcément «changé» avec le temps, il ne se rétracterait pas. «Faire de la théologie, c’est comme écrire une lettre d’amour et de sa foi à Dieu, à l’Eglise et à son peuple», a ajouté le Père Gutiérrez en expliquant que si l’on ne pouvait jamais écrire exactement de la même manière, «l’amour (était) le même».
Le religieux péruvien de 86 ans compte parmi les intervenants des différentes sessions de cette l’assemblée générale de Caritas Internationalis, du 13 au 17 mai, qui a pour thème : «Prendre soin de la création, une seule famille humaine». (apic/imedia/lf/be)