Liban: Les leaders religieux donnent leur «appui inconditionnel» à l'armée

Beyrouth, 31 mars 2015 (Apic) Tous les chefs religieux chrétiens et musulmans du Liban – à l’exception du patriarche grec-orthodoxe Jean X Yazigi, à l’étranger – ont apporté un appui inconditionnel à l’armée libanaise pour faire face «aux infiltrations et menaces des forces takfiries» (extrémistes islamistes adeptes d’une idéologie violente). Réuni le 30 mars 2015 à Bkerké, siège du Patriarcat maronite, le sommet interreligieux a également décidé l’institutionnalisation d’une conférence permanente islamo-chrétienne, dont les réunions ordinaires deviendront trimestrielles.

La concertation entre les chefs religieux musulmans et chrétiens libanais devait faire le point sur l’évolution régionale dramatique et situer le Liban dans la tourmente, rapporte le 31 mars le quotidien libanais «L’Orient-Le Jour».

Au vu des dangers que court le Liban dans une région où les frontières issues des accords Sykes-Picot (accords secrets signés le 16 mai 1916 entre la France et la Grande-Bretagne en vue du partage du Moyen-Orient à la fin de la Première guerre mondiale) sont remises en question, ce sommet revêtait une importance inhabituelle, relève le quotidien francophone. L’absence d’un président de la République qui réglemente la vie des institutions et leur donne la cohésion nécessaire se fait également sentir. La question lancinante de la vacance du siège présidentiel, dont le patriarche maronite, Béchara Raï, s’est fait le champion depuis mai 2014, date à laquelle avait expiré le mandat du président Michel Sleiman, a fait l’objet d’intenses discussions.

La guerre en Syrie et en Irak est dévastatrice pour le Liban

«La présidence de la République, dévolue à un maronite, y a été considérée comme emblématique de la vie commune au Liban et donc de son existence même. La présence du président incarne et symbolise la participation des chrétiens à la vie publique», a précisé une source autorisée proche du sommet. «C’est pourquoi le renvoi continu des séances électorales a été stigmatisé et le verdict des urnes a été proposé comme alternative au consensus, dans le respect de l’esprit du pacte national», a-t-elle ajouté.

La guerre en Syrie et en Irak est dévastatrice, estiment les participants au sommet. En conséquence, un million et demi de Syriens se sont réfugiés au Liban, en sus des milliers d’Irakiens, sans compter un demi-million de Palestiniens. «Tout en exprimant sa compassion pour la situation des réfugiés, le Liban estime que leur nombre et leur dispersion géographique sur toute l’étendue du territoire dépasse sa capacité d’accueil et fait problème en matière de sécurité, d’habitat, d’emploi, de santé, d’éducation, d’infrastructure (eau et électricité), d’alimentation et de transport».

Appel à la communauté internationale

La communauté internationale doit agir et «dépenser plus» pour faire face à certaines conditions inhumaines vécues par les réfugiés. «La capacité d’accueil du Liban est limitée dans l’espace et surtout dans le temps. Par conséquent, il faut empêcher que la présence temporaire des réfugiés ne s’éternise et ne se transforme en présence définitive, ce qui constituerait un grave danger pour l’unité et la stabilité du Liban».

L’assemblée a également dénoncé «le terrorisme revêtu du masque de la religion sous la forme violente du refus de l’autre et de son anathémisation (takfir)». Ce terrorisme a créé une situation de fait en balayant les frontières existantes à la base du Moyen-Orient actuel. Il doit être confronté sur les plans culturel, pédagogique, économique et politique, estiment les participants.

Pas question d’accepter la partition de la région

«L’unification des forces modérées et le développement du discours religieux sont aussi des moyens pour lui faire face. La communautarisation de la vie politique, le non-respect des frontières et les plans de partition rejoignent le plan sioniste bien connu de morcellement de la région en mini-Etats confessionnels en guerre permanente, ce qui permettra à Israël d’exercer sa suprématie», déplorent les leaders religieux. Qui relèvent que les chrétiens d’Orient sont les premières victimes des vagues de violence qui déferlent sur la région.

«Il est indispensable de rappeler que le Machrek (l’Orient arabe, ndlr) a toujours été le lieu d’accueil de la diversité religieuse, que la présence chrétienne y a précédé la présence musulmane de plusieurs centaines d’années et que la contribution des chrétiens a été vitale pour la préservation de la langue arabe ; enfin que cette présence chrétienne joue un rôle-clé dans l’identité de la région».

Les résolutions de cette assemblée ont été lues, pour la première fois, par l’émir Harès Chéhab, secrétaire général du Comité national pour le dialogue islamo-chrétien. (apic/orj/be)

31 mars 2015 | 16:29
par Jacques Berset
Temps de lecture : env. 3  min.
Béchara Rai (30), Bkerké (13), Liban (243), Réfugiés (431)
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