Rome: Document confidentiel des évêques yougoslaves sur Medjugorje (060191)

«On en peut admettre encore l’authenticité des apparitions»

L’abbé René Laurentin maintient sa position favorable aux apparitions

Rome, 6janvier(APIC) «On ne peut affirmer, sur la base des recherches menées jusqu’ici, qu’on a affaire à des apparitions surnaturelles ou à des

révélations», affirment les évêques yougoslaves dans un document confidentiel envoyé à Rome à propos des «apparitions» mariales de Medjugorje, en

Yougoslavie, et dont l’agence catholique italienne ASCA vient de publier

une traduction non officielle. Le document a été rédigé à l’occasion d’une

assemblée extraordinaire tenue par la Conférence épiscopale yougoslave à

Zagreb les 27 et 28 novembre 1989. Le mariologue français René laurentin

dans un commentaire publié dans le journal catholique italien l’»Avvenire»

maintient pourtant sa version très favorable envers l’authenticité des apparitions.

Le texte de la déclaration épiscopale est traduit ainsi par l’agence ASCA: «Les évêques suivent depuis le début (ndlr: 24 juin 1981) les événements de Medjugorje à travers l’évêque du lieu, la Commission diocésaine

locale et la Commission de la Conférence épiscopale yougoslave pour Medjugorje. On ne peut affirmer, sur la base des recherches menées jusqu’ici,

qu’on a affaire à des apparitions surnaturelles ou à des révélations.

En attendant, le flot continu des fidèles en provenance de toutes les

parties du monde et sollicité par des motifs de foi requiert l’attention et

la sollicitude des évêques. C’est pourquoi notre Conférence épiscopale,

dans un esprit de communion ecclésiale, est disposée à assister l’évêque

résidentiel dans l’organisation du travail pastoral à Medjugorje pour favoriser une vie liturgique et pastorale adéquate et pour prévenir et empêcher

ainsi les phénomènes et contenus qui ne sont pas conformes à l’esprit de

l’Eglise».

Dix millions de pèlerins environ se sont déjà rendus à Medjugorje, malgré l’interdiction de l’Eglise catholique d’organiser des pèlerinages officiels, interdiction rappelée encore par le cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Dans une lettre publiée

dans le bulettin diocésain d’Augsbourg (Allemagne), le cardinal informait

l’évêque de ce diocèse de la position des évêques yougoslaves, que le

Saint-Siège a fait sienne: non seulement les pèlerinages officiels, mais

également tout culte fondé sur des prétendues apparitions de Medjugorje restent interdits tant que ne sera pas close l’enquête confiée à la conférence épiscopale yougoslave. L’intervention du cardinal Ratzinger était motivée par l’organisation régulière par «Medjugorje Deutschland» (Beuren Augsbourg) de pèlerinages au lieu des «apparitions», sous la direction spirituelle de prêtres.

Atermoiements et confusion

Depuis le début des apparitions, Mgr Pavao Zanic, évêque de Mostar-Duvno, diocèse dont relève Medjugorje, est plus que circonspect. Dans un rapport publié le 30 octobre 1984, il déclarait avoir acquis la «certitude morale» qu’il s’agissait d’une «hallucination collective» et dénonçait le rôle joué par un groupe de religieux franciscains ( ces derniers avaient été

priés de quitter la paroisse) ayant à sa tête le Père Tomislav Vlasic, «mystificateur et mage charismatique». Devant ce «terrible mensonge», Mgr Zanic a été jusqu’à se déclarer prêt, si la Vierge lui adressait «un signe

sensible», à faire à genoux les 50 km séparant Mostar de Medjugorje!

Cependant, Mgr Frane Franic, archevêque de Split et président de la commission doctinale de l’épiscopat yougoslave, prenant à contre-pied l’évêque

de Mostar-Duvno, affirmait «n’avoir plus aucun doute» sur le caractère surnaturel des apparitions. C’est suite à cette extrême diversité des opinions

épiscopales que la Congrégation romaine pour la Doctrine de la Foi a – fait

exceptionnel – dessaisi l’évêque de Mostar du dossier de Medjugorje pour le

confier à la Conférence épiscopale yougoslave.

Le retard mis à conclure l’enquête n’a pas peu contribué à entretenir la

confusion parmi les fidèles. En avril dernier, l’évêque de Mostar-Duvno

s’est une nouvelle fois inquiété et mis en évidence sur le sujet controversé des apparitions. Dépossédé de l’enquête, il s’est pourtant rendu à Rome

pour remettre une documentation à la presse, afin, a-t-il expliqué, d’accélérer l’examen final auquel était censée procéder une commission ad hoc de

l’épiscopat de son pays. En effet, malgré les mises en garde, les pèlerins

continuaient d’affluer à Medjugorje. Le Saint-Siège, de son côté, se trouvait dans l’impossibilité de prendre officiellement position tant que les

évêques yougoslaves n’avaient pas pris une décision.

La lecture du document épiscopal yougoslave ne permet pas de conclure

que la Conférence épiscopale yougoslave ait arrêté une position définitive.

La déclaration que publie ASCA n’ajoute pas grand chose au communiqué publié à l’issue de l’assemblée extraordinaire des 27 et 28 novembre à Zagreb. Les évêques y disaient renoncer à se prononcer pour l’instant sur

l’authenticité des apparitions, préférant poursuivre leurs échanges «dans

la sérénité et sans préjugé aucun», sur la base des informations disponibles, avant de promulguer, «s’ils le jugent opportun», des directives pastorales appropriées à l’usage des fidèles. Radio Vatican confirmait cette

impression, déclarant qu’il ne fallait pas s’attendre à ce qu’une déclaration soit publiée dans l’immédiat.

René Laurentin : «On juge l’arbre à ses fruits»

Que la récente déclaration de l’épiscopat yougoslave ne constitue pas

une prise de position définitive, c’est en tous cas l’interprétation que

retient l’abbé René Laurentin qui a engagé son prestige mondial de mariologue en défendant l’autenticité des apparitions sans attendre la conclusion

de l’enquête.

Le prêtre français, pour lequel Mgr Zanic se montrait très sévère dans

son rapport de 1984, publie dans l»Avvenire», le journal catholique italien

lié à l’épiscopat, un commentaire dans ce sens.

Le mariologue admet d’abord que les enquêtes menées par l’évêque local,

puis par la commission de l’épiscopat yougoslave, ne concluent pas à l’authenticité des apparitions, mais souligne que celle-ci n’est pas exclue non

plus. «La question reste donc ouverte, écrit-il, dans un dossier où abondent les données favorables» L’abbé Laurentin fait état de conclusions de

la commission scientifique sur les guérisons miraculeuses et sur la santé

mentale des voyants, qui sont «tout à fait positives», mais aussi de l’évidence qui s’est imposée à des millions de fidèles, à des dizaines de milliers de prêtres, à des centaines d’évêques» qui sont venus en pèlerinage à

Medjugorje: c’est le lieu au monde où l’on enregistre le plus grand nombre

de confessions: il faut jusqu’à 150 confesseurs par jour. Medjugorje est

devenu l’endroit où l’on trouve la plus forte proportion de confessionsconversions».

Le célèbre mariologue français observe encore que certains termes «apparemment négatifs» du récent document épiscopal et la manière dont celui-ci

a été diffusé par les «adversaires de Medjugorje» susciteront dans la presse mondiale «des avis purement négatifs qui, une fois de plus, risquent de

créer l’agitation avant que les initiatives pastorales permettent de clarifier le vrai sens du communiqué».

Le commentaire de l’abbé Laurentin se termine ainsi: «Si les évêques qui

se rendent à Medjugorje prenaient la peine de confesser, ne fût-ce qu’un

après-midi, ils sentiraient l’action de Dieu qui s’est imposée à tous les

confesseurs et conclueront, selon la maxime de Jésus: On juge l’arbre à ses

fruits». (apic/cip/jt/ba)

6 January 1991 | 00:00
by webmaster@kath.ch
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