Canada: Les évêques appuient la campagne de Développement et Paix

Reprise en mains de l’œuvre d’entraide catholique

Ottawa, 6 novembre 2012 (Apic) Empêtrés dans la polémique qui enfle depuis des mois autour de «Développement et Paix» (D&P), l’organisme catholique canadien pour le développement, les évêques catholiques canadiens ont décidé de calmer le jeu.

De concert avec les responsables de D&P, les évêques ont publié le 5 novembre 2012 une déclaration de soutien à la campagne d’automne de D&P. Le but est de répondre «aux malentendus possibles qui circulent actuellement dans l’opinion publique».

Le président de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC), Mgr Richard Smith, archevêque d’Edmonton, et Ron Breau, président du Conseil national de D&P, signent une déclaration commune appuyant la campagne intitulée «Agissons pour la justice».

L’aide au développement, une priorité pour tous les catholiques

Dans leur déclaration, Mgr Smith et Ron Breau rappellent les fondements de la doctrine sociale de l’Eglise. Ils affirment que «l’aide internationale au développement devrait être une priorité et une préoccupation pour tous les Canadiens», en particulier pour les catholiques.

La traditionnelle campagne d’automne de (D&P), qui a provoqué l’intervention des évêques, n’avait pourtant rien de révolutionnaire. Parmi le matériel éducatif retiré à leur demande, figurait notamment une carte postale destinée au Premier ministre canadien Stephen Harper, l’exhortant à repenser l’aide canadienne au développement. Il lui était notamment demandé de créer un comité parlementaire spécial chargé de réfléchir à l’avenir de cette aide. D&P avait lui-même été lourdement pénalisé par les processus d’octroi de fonds par l’Agence canadienne de développement international (ACDI). L’organisme catholique, qui recevait de la part du gouvernement 8 millions de dollars canadiens par année, n’en reçoit plus que 3. La nouvelle, tombée en mars dernier, a fait particulièrement mal à D&P, puisque l’apport gouvernemental constituait 40% de son budget annuel.

«Des spéculations dans les médias et parmi les membres quant aux raisons de ces changements ont causé beaucoup d’inquiétude à nombre d’entre vous», peut-on lire dans le message de Mgr Smith et de Ron Breau. Expliquant la raison de ces changements, ils écrivent que le matériel présenté aurait pu être «une source de division entre les évêques, les prêtres, les paroissiens et les bienfaiteurs». L’absence d’unité risquait «de compromettre notre témoignage chrétien de justice et de charité. Ces préoccupations ont été prises très au sérieux». C’est pourquoi D&P «a décidé de réviser le matériel de sa campagne».

Les deux signataires soulignent encouragent les catholiques canadiens «à participer à la campagne dans un véritable esprit de solidarité avec nos sœurs et frères de l’hémisphère Sud».

Encadré

Dans le collimateur des conservateurs depuis des décennies

Vilipendé par les milieux «pour la vie» américains et canadiens, notamment «LifeSiteNews» et la Campagne «Québec-Vie», relayés par des évêques conservateurs, l’organisme catholique «Développement et Paix» (D&P) déchaîne depuis des décennies les passions dans les milieux catholiques canadiens.

Cet organisme, analogue à «Action de Carême» en Suisse ou au CCFD en France, a été fondé en 1967 par les évêques canadiens, dans la foulée du Concile Vatican II. D&P est en crise récurrente depuis 2009. La raison officielle invoquée par ses détracteurs acharnés: le choix des partenaires de D&P à l’étranger. L’œuvre d’entraide serait coupable – selon eux – d’allouer des subventions à des projets liés à la promotion de l’avortement.

Sous influence «marxiste-léniniste»…

Dans la deuxième moitié des années 1970, D&P avait déjà dû affronter de violentes accusations ayant mis à mal les relations avec l’épiscopat canadien. Les milieux conservateurs alléguaient alors d’un appui financier et politique de D&P à des groupes armés dans le tiers-monde, affirmant que l’organisation était infiltrée par des militants marxistes. Les accusations provenaient notamment d’un groupuscule catholique d’extrême droite brésilien, «Tradition Famille Propriété» (TFP), qui avait des antennes au Canada. Ces militants pro-dictature voulaient amener les évêques à retirer leur appui à leur «Action de Carême», et inciter les paroisses du pays à boycotter son financement.

La Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) en avait été ébranlée, au point d’exiger une étude théologique sur le matériel pédagogique et les pratiques de l’organisation. Cette enquête, confiée à un groupe de consultants de Toronto, conclut que les D&P ne contrevenaient ni à la foi, ni à la morale, ni à l’enseignement social de l’Eglise.

C’est en 2000 que le site internet «pro-vie» LifeSiteNews lança ses premières attaques contre D&P suite à l’appui de l’organisation à la Marche mondiale des femmes, accusée d’appuyer le droit à l’avortement. LifeSiteNews, appuyé par certains évêques, porta ses accusations lors du carême dans le but de boycotter le financement de l’organisation catholique par les paroisses et les diocèses. D’autres évêques prirent publiquement position en faveur de l’engagement de D&P dans la Marche mondiale des femmes. Ces dernières années, LifeSiteNews s’est acharné dans sa campagne de dénigrement, et a encore une fois trouvé des oreilles complaisantes auprès de certains évêques canadiens, estime Fabien Leboeuf, qui fut directeur général de D&P de 1996 à 2001. (apic/com/cecc/be)

6 novembre 2012 | 17:04
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
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