St-Gall: 200 millions de chrétiens subissent des persécutions ou des discriminations

Le Tessinois Roberto Simona témoigne devant les évêques européens

St-Gall, 1er octobre 2012 (Apic) Les chrétiens qui subissent des persécutions ou des discriminations aujourd’hui dans le monde sont entre 100 millions et 200 millions. C’est «un fait scandaleux, un fait à dénoncer, une situation qui doit changer pour une raison de justice et dans l’intérêt de tout homme et de chaque gouvernement», a souligné Roberto Simona devant les évêques européens réunis à St-Gall.

Le responsable pour la Suisse romande et la Suisse italienne de l’œuvre d’entraide catholique internationale «Aide à l’Eglise en Détresse» (AED) a témoigné samedi 29 septembre du martyre qu’endurent nombre de chrétiens sur divers continents. Il était l’hôte de l’assemblée plénière du Conseil des Conférences épiscopales d’Europe (CCEE) qui a achevé ses travaux dimanche 30 septembre à St-Gall.

Les chrétiens qui subissent la persécution ont-ils encore quelque chose à dire à la société d’aujourd’hui, avec ses préoccupations, ses ambitions et ses projets, a questionné le Tessinois, qui parcourt le monde pour récolter des témoignages sur la vie des chrétiens pour le compte de l’AED.

Evoquant des contextes de persécutions comme ceux qu’ont connus les chrétiens sous les régimes communistes en Europe de l’Est, en particulier les dizaines de milliers de Roumains qui furent envoyés aux travaux forcés ou jetés en prison en raison de leur foi, Roberto Simona s’est également demandé si les contextes de persécution constituent vraiment des réalités fort dissociées des expériences des chrétiens de nos communautés dans l’Europe déchristianisée.

Regarder la persécution depuis un autre angle de vue

Le responsable d’AED dit avoir découvert, lors de ses voyages, des défis et des dynamiques communs aux chrétiens vivant dans un contexte de persécution et aux chrétiens vivant en Europe démocratique. «Cette découverte pour certains, ou redécouverte pour d’autres, veut encourager de nouveaux projets pastoraux et inciter les chrétiens qui vivent dans des contextes de persécution et ceux qui vivent dans la liberté religieuse à faire face ensemble aux défis communs, dans un échange d’expérience et de don».

Roberto Simona regrette que trop souvent «nous négligeons cet échange parce que nous croyons ou supposons que les chrétiens persécutés vivent des situations extrêmes et dramatiques qui n’ont rien à voir avec ce que nous vivons. Et les chrétiens persécutés pensent que nous vivons des situations faciles, et les défis de nos communautés les interpellent peu». Il ne s’agit cependant pas de remettre en question ou relativiser le drame de la persécution, souligne-t-il, mais de regarder la persécution depuis un autre angle de vue.

Selon différents rapports sur la liberté religieuse, comme celui publié par l’AED, ou l’étude américaine du «Pew Research Center’s Forum On Religion and Public Life», 2/3 de la population mondiale vit dans des contextes où les gouvernements imposent de sévères obstacles à la liberté religieuse. Et de donner l’exemple de l’Arabie saoudite. «Si se déclarer chrétien dans ce pays signifie l’emprisonnement ou pour les expatriés occidentaux l’expulsion, si la conversion d’un musulman au christianisme conduit à la mort certaine, comme ce fut le cas pour Fatima Bint Mohammed al Mutairi, la première martyre chrétienne connue en Arabie Saoudite au XXIe siècle, garder dans ce pays le statut de bon musulman n’est pas chose aisée et tout manquement peut se révéler également dangereux».

Le «printemps arabe», une illusion ?

En Egypte également, où le chercheur s’est rendu récemment, malgré le ›printemps arabe’, «il ne se passe pas un jour sans que les médias rapportent des nouvelles de violence et de discrimination dont les chrétiens sont victimes». Roberto Simona relève, en conclusion de son exposé, qu’il y a toujours davantage dans le monde une tendance à imposer ce qu’on croit être le bien, «les guerres en Irak ou en Libye nous l’ont montré».

Mais, insiste-t-il, «les chrétiens peuvent faire redécouvrir que le bien n’a pas besoin de s’imposer. Il est pratiqué dans des gestes répétitifs, dans un esprit de charité. Charité qui n’est pas le monopole des chrétiens. On peut la recevoir de n’importe qui comme don de l’Esprit saint. Mais il est important de souligner que c’est le Christ qui nous donne cet exemple parfait et complet du don de charité, dans lequel il n’y a aucune forme de violence et de revendication, mais seulement de l’amour, du don de soi, afin de laisser Dieu agir en nous».

Le responsable de l’AED, fort de son expérience de plus de 20 ans passés sur le terrain, relève que les défis et les dynamiques de la mission du chrétien sont souvent les mêmes. Il rêve de se lancer dans des projets pastoraux innovateurs pour encourager les chrétiens qui vivent plutôt une foi identitaire dans des contextes de persécution et ceux qui vivent dans des contextes où la liberté religieuse est respectée, «à faire face ensemble à notre mission d’évangélisation, dans un échange d’expériences et de dons». (apic/be)

1 octobre 2012 | 14:04
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 3  min.
CCEE (61)
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