Rome : Mgr Gerhard Müller nommé préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi

Le plus important dicastère de la curie romaine

Rome, 2 juillet 2012 (Apic) Mgr Gerhard Ludwig Müller, évêque de Ratisbonne, a été nommé le 2 juillet 2012 préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi par Benoît XVI. Le ›Saint Office’, le plus important dicastère de la curie, tenu par le cardinal Ratzinger de 1981 à 2005, retrouve donc un Allemand à sa tête après sept ans passées sous la direction du cardinal américain William Levada.

Le prélat allemand, jusqu’à présent évêque de Ratisbonne, en Allemagne, a été élevé au rang d’archevêque par le pape et sera créé cardinal lors du prochain consistoire. De par sa nouvelle charge, il devient également président de la Commission biblique pontificale, de la Commission théologique internationale et de la Commission ›Ecclesia Dei’. La nomination de Mgr Müller était attendue. La presse l’avait déjà annoncée dès le mois de mai.

Gerhard Ludwig Müller est né le 31 décembre 1947 à Mayence. Après avoir étudié la philosophie et la théologie à Mayence, Munich et Fribourg-en-Brisgau, il obtient en 1977 un doctorat en théologie avec une thèse dirigée par le cardinal Karl Lehmann intitulée L’Eglise et les sacrements dans le Christianisme sans religion. Il est ordonné prêtre à Mayence en 1978 et soutient sa thèse d’habilitation à Fribourg, toujours sous la direction du cardinal Lehmann, sur le thème Communauté et vénération des Saints – Fondation historique de l’hagiologie. En 1986, l’abbé Müller est nommé professeur de théologie dogmatique à la Ludwig-Maximilians-Universität de Munich, poste qu’il occupe jusqu’à 2002. A partir de 1990, il travaille à la commission pour la foi de la Conférence épiscopale allemande.

De 1998 à 2002, il est membre de la Commission théologique internationale, qui dépend de la Congrégation pour la doctrine de la foi et présidée par le cardinal Ratzinger. En 1999, le prêtre allemand participe au Synode des évêques pour l’Europe en tant que conseiller théologique.

En 2002, le cardinal Walter Kasper, alors président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, fait appel à ce fin spécialiste de l’œcuménisme pour mener le dialogue avec les orthodoxes. Au sein de la Conférence épiscopale allemande, l’abbé Müller est en effet président de la commission pour le dialogue œcuménique et contribue à ce titre à la reprise du dialogue avec le Patriarcat de Moscou.

Jean-Paul II le nomme évêque de Ratisbonne le 1er octobre 2002. Mgr Müller est consacré évêque le 24 novembre suivant, fête du Christ Roi, dans la cathédrale de la ville bavaroise, en présence du cardinal Ratzinger, alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. En 2005, le prélat allemand prend part au Synode des évêques sur l’Eucharistie. En 2006, Mgr Müller accueille Benoît XVI à Ratisbonne à l’occasion du voyage du pape en Bavière.

Le gardien des textes de Joseph Ratzinger

Parmi ses domaines principaux de recherche se trouvent le dialogue œcuménique, la théologie de l’époque moderne, la conception chrétienne de la révélation, l’herméneutique théologique et l’ecclésiologie (sacerdoce et diaconat). Parmi ses publications scientifiques (dont le nombre dépasse aujourd’hui les 400) la plus connue est sa « Théologie dogmatique catholique. Pour l’étude et la pratique de la théologie ». Sa Katholische Dogmatik de 900 pages dont la septième édition est parue en 2007 aux éditions Herder est traduite en espagnol, italien et hongrois. Une traduction tchèque est en préparation

L’évêque de Ratisbonne est aussi chargé de la publication des œuvres complètes de Joseph Ratzinger (Gesammelten Schriften Joseph Ratzingers). Pour mener à bien ce projet titanesque – 16 tomes au total doivent être publiés – Mgr Müller a fondé en 2008 l’Institut Benoît XVI, dont le siège se trouve dans la ville bavaroise. Le premier volume a paru en octobre 2008 en allemand et en mars 2009 en italien. Il s’agit en fait du tome 11, qui porte sur la théologie de la liturgie.

Le haut prélat allemand est aussi lié à l’Amérique latine. C’est ainsi que l’université pontificale de Lima (Pérou) lui a conféré un doctorat honoris causa. Mgr Müller est aussi connu pour sa vieille amitié, jamais reniée, avec le théologien de la libération péruvien Gustavo Guttierrez. Les deux ont hommes ont d’ailleurs collaboré à l’écriture d’un livre sur la pauvreté et la théologie de la Libération, paru en 2004. (apic/imedia/cp/mp)

De l’Inquisition à la Congrégation pour la doctrine de la foi

(Note historique et technique)

La Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF) est sans doute le dicastère le plus important de la curie romaine. Le préfet qui la dirige rencontre le pape au moins une fois par semaine. Il est le garant de la foi et de la morale dans l’Eglise catholique. Les bureaux du dicastère sont situés dans le palais du Saint-Office, sur la place du même nom, située à gauche de la basilique Saint-Pierre, derrière les colonnades du Bernin.

La CDF est la plus ancienne des neuf congrégations de la Curie romaine. L’unique organisme qui lui est antérieur est la Secrétairerie d’Etat, fondée en 1487. Le dicastère est en effet l’héritier lointain de la ›Sacrée Congrégation de l’Inquisition romaine et universelle’ instituée par Paul III en juillet 1542. Avec la Constitution Licet ab initio, le pape met en place une commission de six cardinaux ayant la mission de veiller sur la foi. Elle a alors un caractère de tribunal pour les causes d’hérésie et de schisme.

Quelques années plus tard, en 1555, Paul IV élargit ses fonctions au jugement des causes morales. En 1571, saint Pie V crée la ›Congrégation pour la réforme de l’Indice des livres prohibés’ (index). Cette compétence, initialement attribuée à l’Inquisition, revient à ce nouveau dicastère, que Benoît XV supprime en 1917. En 1588, Sixte V réforme encore la curie romaine et, entre autres, la congrégation à laquelle sont confiées les questions de foi et de morale.

Peu de changements sont à noter jusqu’en juin 1908, année où saint Pie X réorganise la congrégation par la Constitution Sapienti consilio, la nommant ›Sacrée congrégation du Saint-Office’. En 1917, Benoît XV lui retire la compétence sur les indulgences mais lui confie celle de la mise à l’index.

Le Saint Office est le premier des organes de la curie à être réformé par le Motu Proprio Integrae Servandae publié à la veille de la clôture du Concile Vatican II, le 7 décembre 1965. Cette année-là, Paul VI rebaptise le dicastère en lui donnant le nom de ›Congrégation sacrée pour la doctrine de la foi’ et améliore les méthodes utilisées pour l’examen de la doctrine de la foi. Au caractère punitif de la condamnation prévaut celui positif de la correction des erreurs, avec la garde, la préservation et la promotion de la foi.

Enfin, en 1988, Jean-Paul II en précise les fonctions, les tâches et les normes, dans la Constitution apostolique sur la Curie romaine Pastor bonus, avant de promulguer en avril 2001 de nouvelles normes procédurales concernant les délits graves relevant de la compétence exclusive de la CDF.

Celle-ci est constituée, à sa tête, d’un collège d’une vingtaine de cardinaux et de trois évêques sous l’égide du cardinal préfet, désormais Mgr Müller, secondé par le secrétaire archevêque – aujourd’hui le jésuite espagnol Luis Francisco Ladaria Ferrer -, par le sous-secrétaire – aujourd’hui l’Italien Mgr Damiano Marzotto Caotorta -, ainsi que par le promoteur de justice, le Père Charles Scicluna. Une trentaine d’autres personnes de toutes les nationalités, réparties en différents secteurs les assistent.

Une trentaine de collaborateurs répartis en trois sections

La CDF est composée de trois sections. La section doctrinale s’occupe des matières en lien avec la promotion de la doctrine de la foi et de la morale. La section disciplinaire traite des délits contre la foi, ainsi que des délits les plus graves contre la morale et dans la célébration des sacrements, notamment les abus sexuels. Ce bureau examine en outre les problèmes liés à la discipline de la foi. Enfin, la section matrimoniale, s’occupant des causes de nullité du mariage et d’autres aspects du lien matrimonial liés à la validité du sacrement. Pour ses études et ses jugements, le dicastère est assisté par un groupe d’une trentaine de consulteurs, professeurs des Universités pontificales romaines et experts dans les diverses disciplines ecclésiastiques qui sont originaires de différents pays.

En outre, trois commissions que préside le préfet sont liées au dicastère. La Commission théologique internationale est composée de 30 membres. La Commission biblique pontificale, compte pour sa part 20 spécialistes nommés pour 5 ans sur proposition des Conférences épiscopales. Enfin, en 2009, Benoît XVI, par le Motu Proprio Ecclesiae Unitatem, a placé la Commission ›Ecclesia Dei’, en charge du dialogue avec les fidèles traditionalistes, sous la responsabilité du préfet de la CDF. Depuis le 26 juin 2012, cette commission compte également un vice-président, en la personne de l’Américain Mgr Joseph Augustine Di Noia.

La tâche de la CDF est celle de promouvoir et de protéger la doctrine sur la foi et la morale dans le monde catholique. Selon l’article 48 de Pastor Bonus, «la tâche propre de la Congrégation pour la doctrine de la foi est de promouvoir et de protéger la doctrine et les mœurs conformes à la foi dans tout le monde catholique : tout ce qui, de quelque manière, concerne ce domaine relève donc de sa compétence».

Le dicastère a aussi pour charge de venir en aide aux évêques en matière de foi. Elle examine les écrits et opinions qui semblent contraires à la doctrine de l’Eglise et s’ils y sont opposés, elle les réprouve. Elle est compétente en matière de foi en ce qui concerne les dispenses matrimoniales ou les délits contre la foi, et défend la dignité du sacrement de la pénitence. Elle agit par procédure administrative ou judiciaire selon le genre des affaires à traiter.

La congrégation favorise aussi les études afin de répondre aux nouveaux problèmes en termes de foi, soulevés par les progrès des sciences ou de la civilisation. Les décisions sont prises par vote délibératif des cardinaux et soumises par le préfet à l’approbation du pape qu’il rencontre au moins une fois par semaine, généralement le vendredi.

Le pari d’Internet

Dernièrement, la Congrégation pour la doctrine de la foi a considérablement développé son site Internet, accessible à l’adresse www.doctrinafidei.va, afin que son enseignement puisse rejoindre un cercle plus vaste de destinataires dans le monde entier. La principale section de ce site présente une liste complète de tous les documents postconciliaires de la congrégation : les documents de nature doctrinale, de nature disciplinaire et concernant les sacrements.

Ces pages contiennent aussi des informations actualisées relatives aux publications de la collection Documenti e Studi, qui présente, en italien, les documents majeurs de la CDF accompagnés de commentaires de certains théologiens reconnus. On trouve aussi des informations, toujours en italien, au sujet des volumes des Actes des symposiums promus par le dicastère. Des interventions des derniers cardinaux préfets sont également proposées, dans diverses langues.

Succédant au cardinal Franjo Seper, préfet de la congrégation de janvier 1968 à novembre 1981, qui lui-même avait pris la place du cardinal Alfred Ottaviani (pro-préfet de la congrégation de 1959 à 1968), le cardinal Joseph Ratzinger a été préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi du 25 novembre 1981 au 2 avril 2005. Le cardinal William Levada, ancien archevêque de San Francisco (Etats-Unis), lui a succédé le 13 mai 2005. Depuis le 2 juillet, le préfet du ›Saint-Office’ est Mgr Gerhard Ludwig Müller, jusqu’alors évêque de Ratisbonne (Allemagne). Elevé au rang d’archevêque avec sa nomination, il sera créé cardinal lors du prochain consistoire.

(apic/imedia/cp)

2 juillet 2012 | 14:13
par webmaster@kath.ch
Temps de lecture : env. 8  min.
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